la fille aux 200 doudous... et autres pièces de théâtre pour enfants
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Acte 2 notaire théâtre dans le Lot








Même décor, le notaire dans son fauteuil, Florence assise sur l’une des chaises devant le bureau.
Le notaire lit une lettre à haute voix.

Maître Pierre : - Madame le maire,
En octobre de l’année dernière, vous aviez jugé ma demande conforme aux intérêts de la commune. Je souhaitais simplement acquérir quelques mètres carrés devant chez moi, afin d’y réaliser un trottoir et une entrée digne de notre historique commune. Ce qui n’influerait guère sur la taille de la place du cimetière ni sur sa capacité d’accueil des voitures. Qui plus est, mes travaux embelliraient le bourg.
Après votre accord de principe, cette demande a soulevé des oppositions en votre vénérable conseil municipal.
Je me permets donc de réitérer cette requête, cette fois de manière officielle, par lettre recommandée.
Ainsi, soit ma demande sera acceptée, soit les motifs du refus seront communiqués. Les deux issues permettront de mettre fin à certaines rumeurs sur une décision politique, ou celle d’une vengeance personnelle suite à une tentative d’arnaque ayant échoué...
Naturellement, si vous jugez préférable, afin d’éviter toute remarque d’un enrichissement grâce à ses fonctions, que cette transaction s’effectue ailleurs qu’en l’étude de votre premier adjoint et néanmoins notaire en notre commune, je m’engage à prendre en charge nos frais de déplacement chez le notaire compétent et intègre de votre choix.
Veuillez agréer... Etcetera...

Silence.

Maître Pierre : - Vous vous rendez compte, Florence, le petit con.

Florence sourit.

Maître Pierre : - Ça vous fait sourire, Florence !
Florence : - C’est bien écrit. Des sous-entendus précis, évidents, mais aucune diffamation.
Maître Pierre : - Bien écrit ! Hé ! Il est pas gêné, il est écrivain. Il devrait avoir honte d’utiliser sa profession pour ainsi m’attaquer, « tentative d’arnaque ayant échoué ! » Le scélérat ! Le petit con !
Florence : - Vous avez bien utilisé votre position pour vous venger !
Maître Pierre : - Florence ! Vous n’allez quand même pas me critiquer ! Jamais ! Tu m’entends ! Jamais il ne les aura ses trente mètres carrés. Même dix, même cinq, moi vivant, ce sera toujours non !
Florence : - Et si le conseil municipal juge sa demande recevable ?
Maître Pierre : - Tu sais bien que cette pauvre femme n’a que le titre de maire, qu’elle n’y connaît absolument rien à la gestion de notre commune, qu’en conséquent elle n’a absolument rien à me refuser.
Yvonne : - Mais si elle te demande tes raisons ?
Maître Pierre : - Hé ! Est-ce que moi je lui demande ses raisons ? Les raisons de Christine sont les plus connues du canton.
Florence : - Tu es vraiment rancunier !
Maître Pierre : - Rancunier, moi ? Jamais ! Si comme tout poète digne de ce nom il se suicide, je suis d’accord pour rebaptiser une rue et prononcer un éloge funèbre. La mort absout de tout. Même du manquement à sa parole. J’ai de la religion, Florence, tu sais.
Florence : - Oh ! Vous souhaitez sa mort !
Maître Pierre : - C’est bon pour le tourisme d’avoir eu un poète ! Nous manquons d’attractivité ! Et il m’avait promis ma commission. Entre hommes, l’engagement passe avant le droit.
Florence : - Mais tu sais bien qu’elle n’était pas légale !
Maître Pierre : - Quand on promet on s’engage !
Florence : - Tu sais bien qu’il n’est pas fou. S’il ne t’avait pas promis ta petite commission sans facture tu l’aurais pigeonné !
Maître Pierre : - Les affaires sont les affaires ma fille ! Tu n’es pas née de la dernière pluie.
Florence : - Parlons donc de notre contrat.

Le notaire soupire, prend dans sa poche son trousseau de clés, ouvre un tiroir, en sort une chemise verte et la tend à Florence.

Florence, se lève : - Bien, maître, je vais étudier cela comme un acte des affaires sont les affaires !
Maître Pierre : - Hé ! Tu peux lire ici... Tu sais comme te regarder est un de mes grands plaisirs.

Florence, en souriant : - Comme tu l’as si bien exprimé et comme je l’ai simplement répété : les affaires sont les affaires.

Maître Pierre sourit, Florence sort.

Maître Pierre : - Quelle femme ! Mais mon Dieu ! Comme c’est difficile de sauver sa vie ! « Pierrot aime l’argent ! » Ah ! S’ils savaient où va mon argent ! S’ils savaient ils diraient « Pierrot aime le cul. » Comme c’est difficile ! S’il savait le mal qu’il m’a fait ce Ternoise en me refusant ma petite commission. « Pierrot est le pire des magouilleurs. » Alors que je n’ai jamais réclamé plus que de nécessaire. Enfin (il sourit) tout s’arrange. Un enfant ! Je vais avoir un enfant ! Avec la plus belle femme du monde. J’aurai un véritable héritier ! J’ai quand même le droit aussi au bonheur. TSA, tout sauf l’assassin ! Mais je ne suis pas un assassin ! En période de guerre, les survivants sont décorés. C’est la loi qui est mauvaise ! Certains ont fait bien pire et pourtant, ils ont la légion d’honneur ! Je ne vais quand même pas porter ce fardeau toute ma vie ! Mais je les aurai à l’usure ! Je serai centenaire ! Ils seront tous au cimetière, ceux qui savent, ceux qui croient savoir, ceux qui ont deviné ! Je les écrase déjà par mon fric ! Je leur survivrai ! Je les enterrerai tous ! Et pourquoi je ne le reconnaîtrais pas cet enfant ! Flo me prend pour un âne en matière scientifique... Mais je sais bien qu’avec un test ADN, je pourrais prouver qu’il n’est pas mon fils, cet idiot de Marcel, et prouver ma paternité ! Oh Flo ! Si je t’épousais, ma Flo ! Tant pis si la vieille se suicide ! Mon bonheur avant tout ! Et nous partirons de ce coin perdu ! Tu mérites mieux que tout ça, ma Flo...

On frappe

Maître Pierre : - Entrez.

Yvonne entre.

Yvonne : - Pierrot, il faut que je te le dise... Car je suppose que tu n’as rien remarqué...
Maître Pierre : - Je t’écoute.
Yvonne : - Florence a l’air bizarre ces jours-ci.

Maître Pierre, en souriant : - Bizarre ? Tu as vraiment dit bizarre, comme c’est bizarre.
Yvonne : - N’ironisez pas. Elle nous cache quelque chose. Elle a changé.
Maître Pierre : - Florence est une jeune femme, elle res-semble plus à son époque qu’au village, nous avons eu son âge.
Yvonne : - Mais elle ne m’a pas dit bonjour depuis plus d’un mois !
Maître Pierre : - Votre fils lui a peut-être fait des confidences sur l’oreiller !
Yvonne : - Oh !
Maître Pierre : - Quoi oh !
Yvonne : - Vous m’aviez promis, promis de ne jamais utiliser ce « votre ».
Maître Pierre : - Il faut donc croire que cette expression m’a échappé. Bref, votre bizarre ne méritait pas que vous délaissiez ainsi votre cuisine.
Yvonne : - Et d’ailleurs, que faites-vous ici à cette heure ?
Maître Pierre : - Hé pardi ! Je suis en mon étude. J’attends la clientèle.
Yvonne : - Et vous n’aviez pas rendez-vous avec le châtelain ?
Maître Pierre : - Oh zut ! (il regarde sa montre) Je me sauve... Vous direz à Florence que nous terminerons le dossier à mon retour...
Yvonne : - Naturellement... Florence connaît suffisamment son métier pour que je n’aie pas à lui préciser...

Il est à un mètre de la porte donnant sur l’extérieur quand Florence, en colère, ouvre la porte secrétariat, tenant à la main droite le dossier.

Maître Pierre : - Florence, j’ai rendez-vous avec le châtelain... Excusez-moi...

Le notaire sort rapidement.

Yvonne : - Vous entrez chez le notaire comme dans un moulin, sans frapper.
Florence : - Mais j’ai frappé, madame Yvonne. Peut-être devriez-vous consulter un spécialiste.
Yvonne : - Oh !
Florence : - Vous voulez dire « certes ». Voyez donc un audioprothésiste.
Yvonne : - Oh ! Décidemment, cette journée n’annonce rien de bon. Mes calculs astrologiques se révèlent une nouvelle fois exacts. Puisque c’est ainsi, vous mangerez ce que vous trouverez, je vais me recoucher !
Florence : - Vous allez !...
Yvonne : - Oui Florence... La dernière fois que mes calculs astrologiques ont donné 124... Oh non ! Oh mon Dieu ! Quel drame va nous tomber dessus aujourd’hui ?
Florence : - Et qu’advint-il alors ?
Yvonne : - Vous êtes trop curieuse parfois, ma fille.

Yvonne fait un pas en direction de la porte.

Florence : - C’était le matin du puits.

Yvonne vacille. Se retourne.
Yvonne : - Vous venez de dire ?
Florence : - Je vous posais une question... La journée 124, c’était bien celle du puits ?
Yvonne : - Mon Dieu ! Mon Dieu ! (elle s’effondre sur une chaise)

Florence, tente de la relancer (doucement) : - Le puits...
Yvonne : - Qui vous a parlé du puits !
Florence : - Vous, Yvonne.
Yvonne : - Je ne vous ai jamais rien dit.
Florence : - Justement, il faudrait m’expliquer, sinon j’imagine.

Yvonne, se lève : - N’imaginez jamais Florence ! Tout le monde a ses secrets. Mon Dieu ! Et vous annoncerez aux hommes que je suis souffrante, qu’il ne faut pas me déranger.

Yvonne sort.

Florence, s’assied dans le fauteuil du notaire : - Je devrais peut-être prendre mes jambes à mon cou et quitter cette maison de fous !... Ah non !... Quand même pas au moment où tout va s’arranger ! Il a intérêt de me la modifier cette petite phrase ! Il faut quand même qu’on se dépêche de passer une nuit ensemble ! (Florence sourit) Si dans deux siècles quelqu’un déterre toute cette famille pour des tests ADN, quel sac de noeuds ! Mais enfin, tout le monde sera heureux ! Le bonheur dans l’ignorance ! Marcel se demandera comment il a réussi à me faire un enfant mais il sera fou de joie ! Pierrot va triompher ! Et moi ! Je suis la reine Machiavelle ! Et en plus amoureuse ! Et si en plus c’était réciproque ? Pauvre notaire ! Encore une fois cocu ! Et cette fois avec son écrivain préféré !... Calme-toi Flo... Personne ne doit deviner cet amour clandestin...

On frappe.

Florence : - C’est ouvert.

Entre Marcel (très efféminé).
Marcel : - Oh Flo ! Toi dans le grand fauteuil de père ! Oh Flo ! S’il te voyait !
Florence : - J’ai autant droit à cette place que lui !
Marcel : - Oh Flo !
Florence : - Finalement, maître Pierre n’a jamais eu le moindre diplôme et tout le monde le croit notaire.
Marcel : - Oh Flo ! Tu sais bien que père déteste qu’on l’appelle ainsi.
Florence : - Quoi, maître Pierre, ça swingue !
Marcel : - Tu sais bien qu’à son époque, tous les métiers s’apprenaient sur le tas. Il faut plutôt admirer son parcours.
Florence : - Tu l’admires vraiment ! Franchement ? Entre nous, dans le secret de ce confessionnal improvisé.
Marcel : - Oh Flo ! Tu plaisantes ? Tu sais bien que d’avoir maintenu vivace cette étude à la campagne, c’est une véritable performance.
Florence : - Est-ce que tu m’aimes ?
Marcel : - Oh Flo ! Que se passe-t-il ?
Florence : - Ça faisait si longtemps que nous n’avions pas fait l’amour.
Marcel : - Fait l’amour !
Florence : - C’est charmant ! Tu ne te souviens plus !
Marcel : - Oh Flo ! Mais si !...
Florence : - Tu étais vraiment ivre !
Marcel, troublé : - Je disais... Faire l’amour... C’est bien normal pour un jeune couple...
Florence : - Mais c’est rare.
Marcel : - Rare, rare... Tu comptes, toi ?
Florence : - Les doigts d’une seule main suffisent.
Marcel : - Oh Flo... Tu sais combien je suis harassé, toujours sur les routes... Et cette histoire d’étude me perturbe... Tu sais bien qu’il me faut au moins neuf heures de bon sommeil. Je me demande vraiment pourquoi père ne veut pas qu’au moins nous soyons associés. Je ne demande rien d’extraordinaire. Des collègues ont des petits sourires qui me déplaisent quand ils me posent la question.
Florence : - Il suffirait que tu ne lui laisses pas le choix.
Marcel : - J’aimerais t’y voir !
Florence : - C’est simple : j’arrive, je m’assieds sur le bureau, je le regarde droit dans les yeux, je fredonne « tin tin tin ».
Marcel : - Tu sais bien que personne ne peut soutenir son regard !
Florence : - Un certain Ternoise l’a fait.
Marcel : - Ça ne lui a pas porté bonheur. Jamais il n’aura son trottoir.
Florence : - Moi aussi, si je veux, je soutiens son regard, au vieux.
Marcel : - Oh Flo !
Florence : - Alors, tu lui balances : « puisque tu souhaites travailler jusqu’à 96 ans, je vais reprendre une étude à Cahors. »
Marcel : - Et s’il me répond « bonne chance, le fiston. »
Florence : - Hé bien ! Nous partirons à Cahors ! Mais il n’osera jamais prendre ce risque (sourire), il sait bien qu’il te suffirait de quelques mois pour que ton étude prenne nettement plus d’importance que la sienne.
Marcel : - Je n’oserai jamais. Et tu sais bien que je ne ferai jamais rien qui puisse le contrarier.
Florence : - Tu as la possibilité plus radicale : tu descends une demie bouteille de whisky et tu l’attrapes par la cravate, tu lui cries dans les oreilles « tu signes ou je te casse la gueule. »
Marcel : - Oh Flo ! Où vas-tu chercher tout ça ? Parfois tu me fais frémir !


( pour le théâtre dans le Lot, voyez acahors.com cahors - LOT )

Rideau



suite : Acte 3 notaire tragécomédie contemporaine

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